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Un jour férié au zoo

Xavier Arpino est photographe et chef opérateur pour le cinéma documentaire.

Depuis 2016, il fait partie du projet WOLF (WildnessOfLiFe), organisation basée à Andorre qui oeuvre pour la création d’un sanctuaire pour le loup ibérique dans les montagnes catalanes.

Il participe aux débats et filme l’activité de l’association dans le but de réaliser un documentaire sur la création de ce sanctuaire, des problématiques politiques et des enjeux environnementaux qui y sont liés.

Jardin zoologique du parc de la Tête d’or, Lyon.

Rester un long moment à observer le manège des visiteurs et des animaux. Les animaux se cachent, les visiteurs passent sans s’arrêter.

Les animaux réapparaissent, les humains s’agglutinent.

Imparable scénario cyclique.

Autour de l’espace des lions asiatiques, j’entends un père dire à ses enfants : « Ça va … Ils ont de la place quand même ». Les enfants n’ont pas répondu. En regardant ce petit terrain muré d’un coté, ouvert au public de l’autre, je m'interroge : Jusqu’à quel point le croit-il lui même ? Jusqu’à quel point ses enfants croient-ils leur père ?

Jusqu’à quel point chacun préfère peut-être ne pas dire la vérité à l’autre.

Alors je me rappelle, quand je venais, enfant, avec mes parents ou mes grands-parents. Je me souviens de l’excitation et de la grande joie de voir des animaux. Mais je me rappelle aussi la tristesse qui s’accompagnait lorsque nous passions devant le grand ours. Il était dans une cage ronde en métal forgée, bétonnée, sans grand chose à l’intérieur, un endroit avec de l’eau, un tronc sec. Ce vide. Ce tout petit espace de vie. Cet ours était triste, et nous le renvoyait évidemment.

Plus tard, quand le hasard des conversations m’amena à en parler avec des gens qui y étaient allés enfants, je me rendais compte que le souvenir de cette cage, de cet ours, était unanimement un sentiment de tristesse pour tous.

Aujourd’hui la vision de ces animaux me rempli à nouveau de tristesse .

Quel sens continue à avoir tout cela ?

Les animaux dans les zoos sont affaiblis, malheureux et psychotiques, certains adultes sont résolument tristes de les voir et ne vont jamais dans les zoos, et les enfants en sont joyeux, un temps. Mais cette joie ne peut être que polarisée lorsqu’on va plus loin en grandissant.

Le Parc de la Tête d’Or à Lyon abrite un couple de lions d’Asie, « Panthera Leo Persica », l’une des sept sous-espèces de lions. Au regard du dernier recensement, au printemps 2017, il semblerait qu’il ne reste que 650 individus environ dans la forêt de Gir, dans l’état du Gujarat, en Inde, leur unique et dernier habitat terrestre sauvage. En 1995, est lancé un programme de réintroduction des lions dans la réserve de Kuno, dans l’état indien du Madya Pradesh (d’où ils ont disparu en 1873), afin de sécuriser un deuxième foyer naturel pour les lions. Mais le chalenge semble impossible. Entre les rouages judiciaires indiens, entre les fiertés politiques locales, les innombrables évaluations techniques nécessaires et le business autour de l’activité touristique, aucun lion ne semble avoir été déplacé à ce jour…

L'UICN red list (Union Internationale pour la conservation de la nature) a classé le lion d’Asie « en voie d’extinction », car les estimations de population sont en hausse ces dernières décennies et non « en voie d’extinction critique » bien qu’il a souffert d’une chute incontrôlée et inexplicable entre 2010 et 2014.

Mais la réalité de leur vie reste sous pression permanente.

La direction du parc de Gir annonce en juin 2017 un record d’affluence à la hauteur de 522 000 visiteurs en un an ! En outre, la réduction de l’aire de vie, donc de choix de nourriture, la présence accrue d’éleveurs et de chasseurs dans la zone, et la consanguinité forcée réduit les facilités de procréation. Ajouté au fait que ces dernières années, la grande rareté des animaux sauvages en voie d’extinction a fait l’objet d’un commerce illicite qui atteint des valeurs monétaires astronomiques.

Combien de temps cette situation fragile peut-elle encore durer ? Les zoos aident-ils la prise de conscience sur le besoin de conservation ? Empêchent-ils, par le fait de continuer à offrir ces animaux aux visiteurs, de prendre réellement des décisions radicales pour empêcher le massacre et l’inconscience de la disparition définitive de ces créatures dont les visiteurs n’ont qu’un minuscule échantillon, sans pouvoir comprendre qui ils sont réellement ?

Un jour viendra où ils n’existeront plus qu’en captivité. Et puis un autre jour viendra où un zoo, quelque part sur terre, abritera le dernier lion d’Asie… Ce jour-là, il ne sera plus possible de dire aux enfants que ce dernier représentant d’une immense histoire immémoriale possède assez de place pour vivre, même si le parc entier est désormais tout à lui.

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